Faut-il établir le mariage et l'adoption pour les couples homosexuels?

15/09/2007 20:02

Sur ce sujet, les positions politiques sont connues: en matière de société, il existe des conservateurs (pour aller vite, à droite: UMP, MPF, FN, MNR) et des libéraux (pour aller vite à gauche et au centre: de la LCR au PS). Ce qui m'intéresse aujourd'hui, c'est la position de François Bayrou, président du parti centriste MoDem, ancien candidat à la présidentielle et qui, dans son livre programme intitulé "Projet d'espoir" (Plon 2007), donnait sa position sur le sujet, à la manière d'un président, garant de la cohésion sociale. C'est à partir de l'extrait qui vient que se porte ma réflexion et que porteront, je l'espère, vos commentaires pour répondre clairement à cette question de société.

" Je parlais plus haut de la compréhension de l'autre, du différent. Cette démarche de l'esprit s'est imposée à moi dans les questions sociétales. Plus particulièrement sur celles liées à l'homosexualité (...) [je n']avais sur [ces] questions (...) pas beaucoup d'ouverture. Je m'en tirais en affirmant que tout cela appartenait à la vie privée de chacun et que l'Etat n'avait pas à s'en saisir. Et puis j'ai essayais de comprendre. Ce que me disaient mes amis, amis d'enfance, amis de l'âge adulte, qui vivaient l'homosexualité (...) Je n'ai pas approuvé la pétition de plusieurs centaines de parlementaires affirmant qu'un enfant avait besoin "d'un père et d'une mère". J'ai aussitôt pensé à ces centaines de milliers de femmes qui élèvent seules leurs enfants, sans qu'un père se soit manifesté auprès d'elles, ou avec un père absent, occasionnel, ou avec un père qui s'en est allé. Ces femmes tracent la route pour leur enfant, obligées d'être à la fois père et mère, et y arrivent souvent magnifiquement. Et quand elles ont du mal à y parvenir, l'effet n'est pas plus grave que les crises qui perturbent un si grand nombre de familles traditionnelles.

(...) On me demande, sous forme d'accusation, si je suis "pour" l'homoparentalité. Mais mes interlocuteurs ont-ils conscience que l'homoparentalité ne nous a pas attendus pour exister? Il y a en France 300 000 enfants élevés par des parents homosexuels, issus d'unions classiques (...) Je suis persuadé depuis très longtemps que l'on ne choisit pas de devenir homosexuel. C'est une structure profonde de la pesonnalité, qu'on accepte ou qu'on refoule, mais dont on est ni l'auteur ni le responsable. Et je sais ce que représente de doutes et de lourds combats intérieurs la découverte de cette identité. Le taux de suicide chez les jeunes homosexuels est cinq fois plus élevé que chez les autres jeunes !

[Les enfants élevés par les couples homosexuels] sont des enfants mis au monde, par insémination, souvent dans le cadre d'un couple de femmes. Ils ont un lien de filiation avec l'une des deux femmes, aucun lien d'aucune sorte avec l'autre. Qu'arrive-t-il si leur mère légale ou biologique meurt? J'ai suggéré qu'il fallait reconnaître, dans ce cas précis, le lien avec le deuxième parent pour que, en cas de décès, l'enfant ne reste pas seul. Cela est d'autant plus facile qu'il existe en France le mécanisme de l'adoption simple, créé après la guerre de 1914 pour offrir un cadre légal à la reconnaissance du lien, en cas de remariage, entre un orphelin de guerre et le deuxième mari de sa mère.

Certains disent: vous portez atteinte à la famille. Je n'en crois rien. Pas plus que je ne crois que (...) le Pacs ait été dommageable au mariage. Au contraire. Le nombre de mariages s'accroît en France et le Pacs est souvent utilisé par de nombreux couples hétérosexuels comme un premier pas vers un engagement de plus longue durée (...) alors, me dit-on, pourquoi ne franchissez-vous pas le pas? Pour une raison toute simple: parce que je plaide la compréhension réciproque. Cette compréhension, je la demande à l'égard des couples homosexuels. Mais je la demande aussi pour les millions de nos compatriotes qui voient dans le mariage une institution s'adressant à une femme et à un homme (...) La charge d'un président, c'est aussi d'amener les uns à comprendre les autres. "

A la lecture de cet extrait, dans les toutes dernières pages de ce livre passionnant, j'ai compris pourquoi je voterais François Bayrou au premier tour de la présidentielle: non que la question de l'homosexualité ait été au coeur de la campagne, mais ce sujet permet au président de MoDem d'avancer une conception très intéressante du rôle du président. Et d'expliquer que le rôle du politique est plus d'accompagner, par la loi, les évolutions que connaît la société et non de les provoquer. Le dernier paragraphe donne la meilleure des réponses: pas de mariage homosexuel pour le respect de l'institution, réforme du Pacs pour en améliorer les formalités, réforme de d'adoption qui permette d'aller progressivement vers une homoparentalité reconnue.