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JES6 - Pour une France Juste, Ecologique et Sociale

Ce blog rassemble mes idées et constitue une modeste pierre pour bâtir une alternance en 2022.

USA: les candidats et la crise ossète

On le sait : les électeurs américains ne sont pas aussi intéressés, en 2008, par les questions internationales et stratégiques qu’ils ne l’étaient, avec la guerre d’Irak et la menace terroriste, en 2004. Les deux prétendants à la Maison-Blanche s’opposent essentiellement sur des questions intérieures : sécurité et droit constitutionnel au port d’armes à feu, intégration - notamment économique - des minorités, pouvoir d’achat et résolution de la crise du logement, mise en place d’une assurance santé pour tous. Actuellement en vacances, les deux candidats ont toutefois profité de la crise née autour du conflit russo-géorgien dans le Caucase pour construire leur envergure nationale et montrer leur capacité à diriger la première puissance, économique, militaire et diplomatique, du monde. Alors que George Bush était devancé par les Européens, et notamment par Sarko, les deux candidats ont publié plusieurs communiqués, au fur et à mesure de l’évolution de la situation. L’occasion pour les électeurs américains, mais aussi pour tous les citoyens du monde, d’apprécier les deux conceptions différentes qu’ont les deux présidentiables de la diplomatie américaine d’après-Bush.
Avant d’entrer dans le détail de leurs déclarations pour les analyser, livrons nous à un exercice de simplification qui, même s’il est caricatural, résume assez bien ce qui sépare McCain d’Obama. Le premier réaliserait une politique étrangère pire que celle de Bush, allant dans le même sens mais bien plus loin. Le second ferait entrer les Etats-Unis dans une phase de dialogue, faisant de l’Europe son premier partenaire. D’un côté, un "américano-centrisme" qui place l’OTAN et la force armée au premier plan d’une action qui vise à intimider celui qui est dépeint comme l’adversaire. De l’autre, l’envie de partager la prise de décision sur la base d’une médiation pacifique en mettant en avant l’ONU et en cherchant à entretenir de bonnes relations avec tous les acteurs mondiaux. La visite de Barack Obama en Europe avait déjà permis de constater l’incontestable rupture que le sénateur de l’Illinois, s’il est élu en novembre prochain, s’apprête à offrir aux Etats-Unis. Seule façon, à mon avis, de restaurer la crédibilité d’une Amérique décriée à travers le monde et dont l’image s’est dégradée pendant les deux mandats de "W".
Les deux candidats ont donc réagi au conflit en Ossétie. Ayant pour objectif d’apparaître comme des leaders incontestables, aptes à mener la diplomatie de la première puissance mondiale, McCain et Obama ont utilisé les mêmes armes : le premier s’est exprimé, avant le président américain, à l’occasion d’une réunion électorale en mettant en avant sa réactivité (il a appelé le président géorgien en personne et demandé à deux de ses conseillers de se rendre à Tbilissi dans les prochains jours) ; le second a publié trois communiqués successifs analysant la situation et lançant des appels aux belligérants en fonction de l’évolution de celle-ci. Cette crise internationale, qui profite à un Sarko qui ne préside l’UE que depuis à peine deux mois, est un modèle de récupération politique : ainsi, le principal conseiller diplomatique du candidat républicain, Randy Scheunemann, a rappelé que celui-ci connaît Saakachvili depuis 1997 et que "depuis des années, le sénateur [de l’Arizona] parle du danger de la politique russe, de la façon qu'ils ont de se conduire et de saper la souveraineté de leurs voisins", terminant en rappelant qu’il a "[des] connaissances plus approfondies [et une] expérience [plus large] de l’Histoire" [que celles de son rival].
McCain a donc eu le discours le plus virulent, considérant dès le début du conflit que la Russie en était la seule responsable et que les Etats-Unis devaient aider prioritairement leur allié qu’est la Géorgie. Héros du Viêtnam, jouant sur son expérience militaire passée, le candidat républicain a encore la tête dans la guerre froide. "Des forces militaires russes ont franchi la frontière internationalement reconnue de la nation souveraine de Géorgie. La Russie doit immédiatement et sans condition cesser ses opérations militaires et retirer ses troupes du territoire géorgien", a-t-il estimé. Il a par ailleurs traité la Russie de belligérant sans merci contre une "courageuse petite nation" et a comparé les "tueries" russes dans cette "toute petite démocratie" aux agressions soviétiques du temps de la guerre froide. Affirmant avoir discuté avec le président géorgien en lui disant "parl[er] au nom de tous les Américains" quand il lui a dit que "nous sommes tous Géorgiens", le sénateur de l'Arizona ajoutait que "l'agression russe contre la Géorgie est à la fois une question d'urgence morale et d'importance stratégique pour les Etats-Unis".
Son programme ? 1- intégrer le plus vite possible la Géorgie à l’OTAN car "actuellement, nous n'avons pas la capacité d'intervenir" en Géorgie "sauf de façon humanitaire et économique", a-t-il déploré. "Nous ne pouvons pas faire ce que nous pouvons pour aider les Géorgiens", a ainsi dit McCain, qui sous-entend que les Etats-Unis auraient pu aider militairement la Géorgie si celle-ci avait été membre de l’OTAN. Bref, l’Organisation atlantique comme pierre angulaire de la politique internationale de McCain et le goût toujours prononcé d’un règlement des problèmes par la force, au risque de revenir à une guerre Etats-Unis – Russie que les spécialistes américains redoutent, considérant que l’alliance des deux pays est nécessaire pour la résolution de gros dossiers (tel celui du nucléaire iranien). 2- exclure la Russie du G8. Rappelant que "le président [Bush] a probablement une plus haute opinion que moi sur Vladimir Poutine", le républicain affirme que "la Russie ne partage plus depuis longtemps les valeurs et les principes du G8, aussi elle doit en être exclue".

Parce qu’il a réagi le premier, McCain a donc pu faire ses propositions, contraignant Obama a les discuter plutôt qu’à prendre lui-même l’initiative. Le candidat démocrate a réagi avec précaution et graduation : après avoir appelé les deux belligérants à "montrer de la retenue et [à] éviter l'escalade vers une guerre totale", se refusant de déterminer lequel était responsable du conflit, le sénateur de Chicago a estimé que "toutes les parties devraient entamer des discussions directes pour le bien et la stabilité en Géorgie ; les États-Unis, le Conseil de sécurité des Nations unies et la communauté internationale devraient apporter leur entier soutien à une résolution pacifique de cette crise". Considérant ensuite que la Russie avait aggravé la situation, en entrant en territoire géorgien, le prétendant démocrate n’a pas hésité à condamner le recours simultané à la force par la Géorgie. Préférant la négociation, M. Obama a dit souhaiter un règlement politique, pacifique et négocié du fond du problème : envoi d’observateurs occidentaux pour veiller au respect du cessez-le-feu, envoi d’une force de maintien de la paix véritablement neutre dans la région (alors qu’actuellement, la Russie était censée garantir la paix en Ossétie !) ou encore conclusion d’ "un accord politique (…) pour définir le statut de ces régions disputées", laissant ainsi clairement entendre que la Géorgie devait elle aussi revoir sa politique vis-à-vis des deux territoires contestés.

 

La différence entre les deux candidats à la Maison-Blanche est donc clairement visible : les deux politiques qu’ils mettraient en place en cas d’accession à la présidence des USA seraient en effet bien différente. Le caractère multipolaire du monde actuel a été nettement mieux assimilé par Obama qui laisse à l’ONU et à l’Europe toute la place qu’elles méritent. Ce qui serait de bonne augure pour l’équilibre du monde…
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