G8: une réunion pour rien?

Comme souvent, la dernière réunion du G8 n'a pas donné lieu à un débordement médiatique, comme celui dont on a pu profiter (ou que l'on a subi, selon les points de vue) à propos du lancement de l'Union Pour la Méditerranée, dont les enjeux étaient certes bien plus importants... dans l'immédiat, en tout cas. Car, au fond, le sommet de Toyako (une ville située sur l'île la plus septentrionale de l'archipel nippon) devait réfléchir à des sujets fondamentaux pour l'avenir de notre planète: la question du réchauffement planétaire et le problème de la pauvreté devaient être abordés. Sauf que, une fois de plus, le bilan est mitigé: dans les compte-rendus visibles dans les journaux télévisés, les journalistes semblaient plus intéressés par le nombre de poignées de main ou d'embrassades que les dirigeants présents ont échangé. Les petites phrases, largement anecdotiques au regard de l'importance de cette réunion, n'ont aucune utilité pour préparer le monde de demain, celui que  nos dirigeants vont laisser à leurs enfants, c'est-à-dire aux jeunes de ma génération ! Et des Merkel, Medvedev, Brown et Bush, j'attends autre chose que des sourires, des tapes amicales dans le dos, des petites doses d'humour... quand le monde a les yeux rivés sur ce "club des riches".

Malheureusement, la question qui fait le titre de cet article, plus qu'une interrogation, finit par devenir une sorte de phrase rituelle que nombre de médias posent à chaque nouveau sommet et dont on connaît la réponse avant même que les dirigeants ne soient partie de leurs capitales vers leur lieu de rencontre ! Il devient insupportable de voir autant d'argent gaspillé pour si peu de résultats: imaginez les sommes que représentent l'organisation du sommet (décor, repas, papier) et le déplacement des participants (sans compter les rejets de CO2 dans l'atmosphère !). La productivité de ces réunions est quasi nulle... Heureusement, notre Sarko national a su se démarquer (photo) en abordant une question qui n'était pas à l'ordre du jour et qui paraît pourtant fondamental: jusqu'à quand dureront ces réunions en tout petit comité, de ces huit puissances qui prennent seules - ou pratiquement seules - des décisions qui concernent le monde? Pourquoi ne pas élargir ce groupe en y accueillant de nouveaux membres pour que ces réunions permettent de prendre des décisions aussi importantes et respectées en matière économique que peuvent l'être celles de l'ONU en matière de maintien de la paix? On attend toujours une réponse - et surtout une décision - de nos partenaires !

Sur ce point, comme sur les deux autres qui étaient à l'ordre du jour, rien de concret n'est ressorti de cette réunion. On sait que les Etats-Unis, sous la présidence Bush - qui, enfin, va arriver à son terme -, ne sont pas prêts à faire des efforts en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Et que dire du spectacle offert sur la réduction de la pauvreté? De la compassion, rien d'autre ! Grands seigneurs, les huit "grands" ont accepté de recevoir sept ou huit dirigeants africains pour montrer, symboliquement, que ces pays étaient associés à la prise de décision. Sauf, qu'aucune décision n'a été prise. Bref, on a eu droit à un beau symbole, à une belle photo... et à rien de neuf pour apporter une réponse à la crise alimentaire qui tue silencieusement des centaines d'hommes, de femmes et d'enfants dans les pays les plus pauvres ! Vous l'aurez donc compris: mon appréciation sur l'efficacité de cette réunion japonaise du G8 est sévère. Et, pour finir, j'aimerais la comparer à deux autres évènements qui font, en ce moment, l'actualité pour montrer à quel point le G8 est - sous sa forme actuelle - parfaitement inutile à la bonne marche du monde.

1- aujourd'hui a lieu le défilé miliaire du 14 Juillet, sur les Champs-Elysée, en présence des dirigeants ayant participé, hier, au sommet sur l'Union Pour la Méditerranée. A cette occasion, de très nombreux symboles vont marquer cette matinée: présence du secrétaire général de l'ONU et ouverture du défilé à pied par des Casques bleus pour donner corps au thème choisi cette année - le maintien de la paix. En reconnaissant, symboliquement, que cette mission est du seul ressort des Nations Unies, et en conviant les désormais membres de l'UPM, Sarko aurait-il voulu montrer que cette Union est une coopération non exclusive, qui se voudrait un outil au service de l'ONU pour pacifier la région concernée? Ce serait intéressant et pertinent. Sarko aurait-il par ailleurs, en associant le drapeau européen au drapeau français (présidence française de l'Union obligeà, voulu montrer qu'une Europe de la défense est souhaitable, en dehors de seules missions de maintien de la paix? Ce serait tout aussi intéressant et pertinent. Bref, qu'un défilé, jour de fête nationale, serve à multiplier les symboles, c'est son rôle. Qu'une réunion comme celle du G8 s'en contente, c'est désolant.

2- hier se tenait donc, au Grand Palais à Paris, le premier sommet de l'Union Pour la Méditerranée, qui a lancé cette coopération que l'on espère fructueuse entre les Etats riverains de la Méditerranée. Là aussi, les symboles (la poignée de main et la photo de tous les dirigeants présents, les uns après les autres, entre Sarko et l'Egyptien Moubarak sous l'affiche officielle du sommet) étaient de rigueur. Plus qu'une réunion de décision, elle devait être un sommet symbolique: la présence de tous ces dirigeants, les objectifs affichés de l'UPM, les discours et les premiers chantiers lancés devaient montrer, aux citoyens des pays concernés, qu'il ne s'agissait pas de gaspiller de l'argent pour se réunir, rigoler et manger ! Ces déclarations de belles intentions - l'essentiel étant qu'elles soient aussi sincères - doivent nécessairement marquer le coup d'envoi d'un tel rassemblement, en veillant à ce qu'elles ne se reproduisent pas trop souvent à l'avenir. Le G8 n'en étant pas à son coup d'envoi, que les chefs d'Etat et de gouvernement présents pensent à l'image qu'ils donnent avant de réfléchir à un programme d'action est scandaleux ! Gageons que l'UPM n'en prendra pas le chemin... au risque de décevoir encore un peu plus les citoyens, encore enthousiastes, que nous sommes !