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JES6 - Pour une France Juste, Ecologique et Sociale

Ce blog rassemble mes idées et constitue une modeste pierre pour bâtir une alternance en 2022.

La justice française va-t-elle dans le mur?

Le gouvernement, comme prévu, va aller très vite: dès cet été, les parlementaires auront du pain sur la plache... lors d'une session extraordinaire, ils devront discuter des principaux projets que le président Sarkozy entend mettre en oeuvre, comme il s'y était engagé ! Voilà un très bon point: un homme politique qui respecte sa parole, surtout au plus haut niveau de l'Etat, cela manquait à la France... mais, sur le fond, on peut légitimement se poser des questions car la majorité UMP qui se profile va avoir les mains libres pour "enregistrer" (je ne mets pas "discuter" pour être un peu polémique) les projets présidentiels. Je m'attarderais, ici sur trois points, qui me paraissent essentiels dans le projet relatif à la justice que défendra Rachida Dati.

1- concernant la délinquance des mineurs, deux visions opposées avaient été mises en avant lors de la campagne des présidentielles (et pendant le débat de l'entre-deux-tours), entre une vision plutôt répressive et une autre, plutôt préventive. Puisqu'il n'est pas question de caricaturer, les deux projets mêlent les deux aspects, mais chacun en privilégie un: pour Nicolas Sarkozy, la prévention peut se faire dès la maternelle et la répression doit être implacable, avec l'objectif d'abaisser la majorité pénale à 16 ans pour que les mineurs concernés puissent être aussi sévèrement condamnés que les majeurs. Pour Ségolène Royal, la sanction de la première infraction et le placement des mineurs dans des structures adaptées à leurs besoins devrait permettre d'éviter la récidive. Les Français semblent avoir choisi la première option, considérant que la justice est trop "laxiste" à l'égard de ces jeunes. Mais, la délinquance ayant des sources diverses, elle nécessite un traitement spécial, que la majorité pénale à 16 ans ne devrait pas apporter.

Par principe, je suis opposé à cette dernière mesure si elle ne s'accompagne pas d'un abaissement de la majorité légale à 16 ans, afin que les citoyens aient à la fois de nouveaux devoirs (c'est ce que veut Sarko) mais aussi de nouveaux droits (le couplage des deux était un des principes mis en avant par ce même Sarko pendant la campagne). Cette mesure, qui doit être débattue, n'appelle qu'une réponse: soit, la France suit l'Autriche, qui vient de porter la majorité à 16 ans, soit on maintient la majorité (dans tous ses apsects) à 18 ans. Ma position est connue: et vous, qu'en pensez-vous?

2- quant aux peines planchers, qui visent à prévenir (le mot est le bon) la récidive, en dissuadant les ex-condamnés de passer à l'acte: ils sauraient alors à quelle peine ils s'exposent. A priori, cette mesure relève du bon sens... mais, elle pose deux problèmes: 1- le terme de "peine plancher" est anticonstitutionnel, car la Constitution française prévoit que les condamnations sont définies par rapport à l'unicité d'une personne, qui tient compte de son parcours et des circonstances du crime ou du délit. 2- elle ne respecte pas l'indépendance des pouvoirs (ce qui est la base d'une démocratie), le législatif intervenant dans le champ du pouvoir judiciaire. Dans ce cas, elle viole l'indépendance des juges qui sont seuls à pouvoir juger la gravité des faits, à retenir des circonstances aggavantes ou atténuantes, en fonction desquelles ils discutent d'une peine appropriée.

En revanche, ce texte offre un avantage non négligeable: dans les cas les plus graves, pour les crimes les plus atroces, il est logique que l'opinion publique soit choquée de voir ces prévenus condamner à des peines jugées faibles. Le non-respect des peines de prison à perpétuité en est l'exemple le plus flagrant: je ne rejette donc pas l'instauration de peines minimales, qui existent par ailleurs dans de nombreux autres pays, à condition qu'elles soient limitées aux cas les plus graves qui nécessitent une sévérité maximale. En ce qui concerne les vols, mêmes mineurs, qui n'engendrent actuellement que des condamnations à de la prison avec sursis, la mesure est plus contestable.

3- les deux mesures précédentes posent un autre problème, qui ne semble pas être une priorité de la nouvelle ministre: celui de la surpopulation carcérale. Envoyer plus de mineurs en prison, condamner les multirécidivistes (même d'infractions "mineures") à des peines systématiques de prison supposent de pouvoir acceuillir toutes ces personnes, et dans des conditions qui soient dignes du pays des droits de l'homme. Des cellules individuelles, mieux équipées, ainsi que des quartiers de vie familiale (comme le réclament certaines associations), doivent faire l'objet d'une discussion et d'un investissement. Se posera également le problème de la géographie des prisons, qui, comme celle des tribunaux (sur laquelle le président a demande que l'on se penche), nécessite une mise au clair.

Un autre sujet, malheureusement d'actualité, est aussi au coeur des préoccupations de la ministre de la justice: la sécurité des palais de justice, que deux affaires relancent... après l'aggression au couteau d'un magistrat dans son bureau, c'est un condamné pour viol qui vient de se suicider, d'une balle dans le coeur, en pleine salle d'audience de la Cour d'assise de Laon (Aisne). Se pose dès lors la question des portiques de sécurité, dont le but est d'éviter l'entrée dans l'enceinte du Palais de justice d'armes, blanches ou à feu: or, cette nuit, à Laon, ce portique fonctionnait !! Voilà un thème qui doit mobiliser des moyens financiers importants et dépasser les clivages politiques: sans a priori, l'opposition doit discuter de la proposition lancée par François Fillon, qui voit dans le regroupement de petits tribunaux la possibilité de "rentabiliser" les moyens de sécurité disponibles: pas sûr qu'il s'agisse d'une bonne idée... que deviendrait alors la justice de proximité?

En fin de semaine, je proposerais le même article concernant les pistes évoquées pour une réforme fiscale. En attendant, laissez vos commentaires pour entamer le débat et répondre à cette question: le projet du gouvernement est-il juste et efficace?

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B
pardonnez-moi si je ne commente pas le projet gouvernemental mais le suicide d’un condamné à l’annonce du verdict en cours d’assises de Laon, et le phénomène du jugement et du suicide…<br /> <br /> Ce qui fait le plus peur aujourd’hui, à l’écoute des médias et à la lecture de la presse, c’est que n’importe qui puisse porter une arme, rentrer impunément dans les tribunaux et tuer n’importe qui, alors même que la surveillance est accrue !<br /> La question qui me fait le plus peur, à moi, et qui n’est posée nulle part, est autre :<br /> - jusqu’où ira-t-on sans voir que les jugements provoquent une vengeance sans fin et l’autodestruction de l’homme, et non le réveil de la conscience et la reconstruction de la vie ?<br /> - comment peut-on imaginer empêcher absolument un homme de disposer de sa liberté pour faire de lui-même ce qu’il veut, y compris se suicider, quand, ayant éliminé des lois la peine de mort, ces mêmes lois veulent le priver de toute liberté ?<br /> - par exemple, cet homme a violé ! que ferait la « Justice » en voulant empêcher cet homme de se suicider suite au verdict ? Ne serait-ce pas un « viol » de la plus profonde liberté, de disposer de soi-même ?<br /> - peut-on juger d’une part, et empêcher l’homme de disposer de lui-même d’autre part ? qui nous sommes-nous, hommes, pour juger ainsi et disposer ainsi de la vie de qui que ce soit ?
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