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JES6 - Pour une France Juste, Ecologique et Sociale

Ce blog rassemble mes idées et constitue une modeste pierre pour bâtir une alternance en 2022.

Deux ans: tentative (tentation?) d'un bilan

Rappelez-vous. C'était il y a deux ans, un mercredi relativement ensoleillé à Paris. Deux hommes avaient rendez-vous. L'un s'apprêtait à entrer dans l'ombre pour entamer, non pas une traversée du désert, mais l'ascension d'une popularité qu'il n'avait jamais connu. L'autre allait attirer, enfin, et pour lui seul, tous les projecteurs... pour débuter un périple de cinq ans, dont nous célébrons le deuxième anniversaire. Ces deux hommes (vous les aurez reconnu) sont Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy qui, le 16 mai 2007, participaient à la cérémonie de passation des pouvoirs à l'Elysée (photo). Plus que la date du 6 mai, que nos médias ont fêté, c'est sans doute cette date du 16 mai qui est la plus importante car cela fait donc réellement deux ans que Sarko est aux commandes. Et d'ailleurs, mieux vaut, pour lui, célébrer le 16 mai plutôt que le 6 mai: sinon cela signifie que les évènements séparant ces deux dates appartiendraient à sa présidence. Veut-il vraiment que le début de son quinquennant soit marqué par le dîner des amis, fidèles et bientôt récompensés d'une Légion d'honneur sans valeur, au Fouquet's ou par sa retraite spirituelle sur le yacht de son ami Vincent Bolloré? En ne célébrant, discrètement, que le 16 mai comme le commencement du sarkozysme au pouvoir, il pourrait évacuer ces deux douloureuses épines... qui ont participé à noircir son image présidentielle. Deux ans plus tard, un constat s'impose: la rupture, dans le style et la pratique du pouvoir, est telle que la fonction présidentielle a été quelque peu mal menée. Certains s'en réjouiront, de voir un président constamment sur le terrain, court-circuitant ses ministres en faisant toutes les annonces médiatiques. D'autres, comme moi, s'en désolent, constatant que la hauteur de vue que cette fonction nécessite est entièrement absente: ni cap, ni cohérence réelle du propos. Et cela manque aujourd'hui à notre pays.
 
Alors, que retenir de ces deux années au pouvoir? Evidémment, deux mots viennent à l'esprit: "bling-bling" et "hyper-président". Des mots très commentés, qui rappellent le goût de l'argent de notre président, le fait que la réussite individuelle et les signes extérieurs de richesse qu'elle permet semble compter davantage pour lui, et ses plus proches conseillers, que le bonheur personnel, l'épanouissement familial ou le repos mérité après de longues journées ou semaines de travail, parfois pénible. Cette révolution (car s'en est une), qui s'adapte à la bien pensance mondiale, plaçant l'argent au centre de tout, entraîne notre pays dans une voie qui ne lui ressemble pas. Et, comme le dit si bien Caroline Fourrest, journaliste à Charlie Hebdo, N. Sarkozy a mis en place une rupture si profonde et si rapide que le pays en est déboussolé. Les électeurs du président, qui ont fait son éclatant succès de 2007, n'avaient sans doute pas imaginé soutenir une transformation si radicale du pays, au point d'en fragiliser un de ses fondements: notre modèle social. Car, sous les coups répétés, rapprochés et puissants, portés aussi bien contre l'hôpital ou le monde de l'éducation, ce sont deux piliers du modèle français, tant décrié avant la grande crise, qui sont menacés. Et si ces deux piliers sont affaiblis, c'est tout l'édifice qui risque de s'écrouler.
 
Le président, apôtre de l'ultra-libéralisme, du moins d'Etat et de la dérégulation (il était favorable à l'importation, dans notre pays, du système des subprimes !), est devenu, le temps d'une crise économique mondiale inattendue, le chantre de la régulation, de la lutte contre les profiteurs (que ses mesures économiques continuent d'hyper-favoriser) et de l'Etat protecteur. Comme au temps de Chirac, les discours sont beaux... mais les actes ne suivent pas. Pire, il fait le contraire de ce qu'il souhaite: l'exemple de l'apprentissage en alternance, bafouée dans le monde de l'éducation avec le projet Pécresse sur la réforme de l'université, est là pour en témoigner. Et on en vient à la deuxième caractéristique de ce quinquennat: le président est partout, tout le temps, pour dire toujours quelque chose de nouveau. Son obsession? Apporter une réponse immédiate à tous les problèmes qui se posent, en adaptant le temps politique au temps médiatique. Or, c'est le pire qu'un président puisse faire: céder aux sirènes de l'émotion et de la politique-spectacle... sans laisser le temps aux citoyens de réfléchir (ce qui présente des avantages) et aux parlementaires de faire correctement leur travail. Ainsi, sous Sarkozy, les décisions se prennent au Château, le président annonce les mesures, mêmes les plus techniques, pour apparaître en sauveur de la nation. En parallèle, les chiens de garde du sarkozysme aboient contre les adversaires du président en brandissant toujours le même arme: "nous sommes dans l'action et la réforme, nos opposants voudraient enfermer la France dans l'immobilisme". Et, pendant ce temps-là, les députés sont muselés, rappelés à l'ordre à l'occasion d'une petite réunion à l'Elysée, obligés de revoter un texte rejeté une première fois, ou encore transformés en membres d'une chambre d'enregistrement qui valide, sans les amender, les projets du gouvernement (à cet égard, le Sénat fait preuve d'une plus grande liberté de ton).
 
L'Elysée est devenu le centre du monde. Notre président le sauveur de la France, de l'Europe (avec son projet imposé aux Irlandais et son pilotage, volontariste mais incomplet, d'une réponse commune des Européens face à la crise) ou du monde. Sauf qu'entre-temps, un concurrent sérieux, bien plus fin, qui ne parle pas pour raconter sa vie ou multiplier les traits d'humour, est arrivé: le président Obama, qui cultive un autre style, montrant que l'on peut mettre en accord le discours et les actes. Affaibli par son bushisme affiché - il s'est rallié à l'ancien locataire de la Maison-Blanche sur le départ, en dénonçant l'arrogance chiraquienne -, notre président a affaibli l'image de la France à l'étranger. L'épisode du discours de Dakar en est un exemple. L'attitude d'Obama a notre égard, qui nous considère comme des Européens parmi d'autres, en est un autre. Et, pendant que le président se retranche de plus en plus dans un rôle de super premier ministre, sillonnant l'Hexagone dans des voyages hyper-sécurisés (au moins, il ne lui arrivera rien !), le locataire de Matignon célèbre également son deuxième anniversaire à la tête d'un gouvernement fantôme, où les ambitions se téléscopent, où l'envie d'être le meilleur des sarkozystes touche jusqu'aux anciens socialistes à la sauce Besson. François Fillon, dans son style effacé et rigoureux, plait aux Français. Il faut dire qu'il ferait un bon président, lui: une hauteur de vue plus importante que son chef, une capacité pédagogique plus développée, une discrétion... qui le conduit à sillonner le monde, rencontrer nombre de dirigeants étrangers (dont Joe Biden). Comme si les rôles étaient inversés. Au moins, avec une popularité constante et toujours forte (au moins 50% dans les sondages les plus récents), Fillon devrait rester en place encore un bon bout de temps, notamment faute de concurrents à la hauteur du problème (être suffisament dévoué et sans prétention pour rester dans l'ombre).
 
Et, pourtant, Fillon a été l'un des chefs d'orchestre de la petite cérémonie, modeste (car le bling-bling n'est plus au goût du jour), au cours de laquelle Christine Lagarde a chanté un "Happy Birthday" (en anglais, évidemment !!) à son patron. Lequel n'arrête pas de répéter, avec ses plus fidèles chiens de garde, que le vrai anniversaire, ce sera dans cinq ans. Passons, donc, sur l'incohérence d'organiser une telle petite fête. Parmi les émissions qui ont consacré un numéro à cet anniversaire non officiel, "13h15 le dimanche", avec Laurent Delahousse la semaine dernière, le commentait avec une question pertinente: s'il fallait retenir un succès et un échec, de quoi s'agirait-il? Vous pourrez me donner votre avis en postant un commentaire. Avant cela, sachez que la journaliste de Charlie Hebdo, présente sur le plateau, a rappelé la victoire idéologique de la droite sarkozyste sur le reste de la droite et, bien sûr, sur la gauche. Considérant qu'en occupant toujours la scène médiatique et en assomant les Français, et l'opposition, de projets dans tous les domaines, en même temps, le président ne laissait à ses détracteurs qu'un seul choix: disserter sur sa méthode, son style... et les éloigner du fond des dossiers. C'est incontestablement une réussite du sarkozysme. Même si les Français ne sont pas dupes. Pour ma part, je pense que sa présidence de l'UE est sans doute le meiller résultat qu'il est obtenu pour l'instant, avec une intéressant capacité à bouger les lignes et faire avancer des dossiers complexes et sensibles. Quant à son plus gros échec, c'est clair: il s'agit de sa politique sécuritaire. Les chiffres parlent d'eux-mêmes. La délinquance baisse car les violences matérielles chutent (avec la sophistication des moyens de lutte contre le vol) tandis que les violences physiques explosent. L'insécurité envers les personnes n'est pas réglée. Les phénomènes de bandes, les meurtres violents, les agressions d'enseignants en milieu scolaire émaillent nos JT. Or, Sarko gère le dossier depuis sept ans, en tant que ministre de l'Intérieur (officiel ou officieux). Avec un résultat catastrophique. C'est simple: si la gauche était au pouvoir, le thème ferait la "Une" de tous les JT tant la droite hurlerait au scandale. Or, aujourd'hui, rien ! C'est dire l'état des médias et de l'opposition. Maintenant, à vos claviers...
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