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JES6 - Pour une France Juste, Ecologique et Sociale

Ce blog rassemble mes idées et constitue une modeste pierre pour bâtir une alternance en 2022.

Expulsion, mode d'emploi

La semaine dernière, le magazine "Envoyé spécial" (sur France 2) proposait un documentaire consacré aux expulsions d'étrangers en situation irrégulière dans notre pays. Cette enquête, réalisée par une équipe de reporters, a bien spur nécessité l'accord des ministères de l'Intérieur et de l'Immigration, responsables de ce dossier. Les journalistes souhaitant faire de la pédagogie auprès du public, en montrant l'ensemble de la procédure et des acteurs impliqués dans ces affaires, les ministères ont accepté une demande qui avait été déposée en décembre. A un moment où, la fin de l'année 2007 approchant, le débat politique était en partie tournée vers les quotas imposés par Nicolas Sarkozy qui étaient l'un des indicateurs permettant au chef de l'Etat de "noter" son ministre, le fidèle Brice Hortefeux. Bref, politiquement, le gouvernement avait intérêt à ce qu'un tel document, qui se voulait donc pédagogique, soit réalisé: et, tant mieux... car il est particulièrement intéressant ! Pour celles et ceux qui l'auraient malheureusement manqué, voici ce qu'il fait en retenir.

D'une part, l'équipe ayant été amenée à suivre le ministre lors d'un voyage en Afrique, qui avait pour thème principal l'immigration, il faut noter deux choses:
- d'une part, en parlant de son ministère, M. Hortefeux parlait du "ministère de l'immigration, de l'intégration et du co-développement". Exit donc, dans la bouche du ministre, la notion ambiguë et débattue d'identité nationale...
- d'autre part, avant le décollage de son avion (dans lequel il n'y avait pas d'immigré en attente d'expulsion), il tenait à préciser que son rôle n'était pas de faire du chiffre mais bien de faire que les règles fixées par le gouvernement soient respectées et que celles et ceux qui les transgressent soient reconduits dans leurs pays d'origine, avec toute l'humanité qui devait accompagner de telles procédures, hautement dramatiques.

Et ce brillant documentaire montrait parfaitement le rôle de chacun des acteurs de cette longue procédure, et la volonté de bien faire qui les anime. De l'arrestation à l'expulsion par avion, cette enquête rappelle les étapes que la machine administrative ET judiciaire doit respecter: et de montrer, avec des témoignages poignands et à partir d'exemples concrets, comment la France tente de faire au mieux, quelle que soit la couleur politique de son gouvernement, pour éviter des drames personnels, pouvant au mieux destabiliser, au pire détruire des familles. Même si le cas de pères expulsés et laissant leur famille en France ont été abordés: le fait que ces hommes travaillent, qu'ils le fassent depuis plusieurs années, que leurs enfants soient nés et scolarisés en France ne parvenant pas à convaincre les juges. Car, contrairement à ce que certains croient, la procédure d'expulsion fait aussi intervenir la justice: certes, c'est l'administration (par le biais des préfets) qui décide l'expulsion de tel ou tel sans-papier. Mais, ce dernier, après avoir été arrêté et placé en centre de rétention, a la possibilité de faire appel de cet avis, le juge prenant alors en compte la situation personnelle de chacu pour confirmer ou infirmer la décision des autorités françaises.

Le documentaire montre donc toutes ces étapes, nous fait vivre le contrôle d'identité dans les gares parisiennes, l'enfermement dans les centres de rétention, le transport vers le tribunal ou encore la montée dans l'avion... mais, à travers les cas qu'il aborde, noyus décortique aussi les raisons qui poussent ces étrangers à venir en France. Il est clair que l'immense majorité de ces hommes viennent travailler en France pour améliorer, non pas leur propre sort, mais celui de leur famille, souvent restée au pays, et à laquelle ils envoient un maximum d'argent... dans certains cas, l'argent ainsi apporté par les migrants dépasse l'aide publique française au développement. Comme dans le cas du Mali, qui refuse de passer un accord avec la France: si le pays accepte ses ressortissants, expulsés par la France, il pourrait être économiquement fragilisé, l'aide supplémentaire au co-développement ne compensant pas les pertes possibles. La vraie question, ainsi soulevée, est la suivante: la France et tous les pays riches sont-ils prêts à consacrer davantage d'argent au développement des Etats les plus pauvres d'où partent ces migrants illégaux qui, pour certains, perdent la vie au cours de leur voyage?

Il faut croire que "oui" lorsque l'on voit les efforts déployés parles gouvernements successifs de droite depuis 2002 pour encourager les départs volontaires contre de l'argent. Quelques centaines d'Africains ont accepté ce deal: repartir dans leurs pays pour y monter une affaire qui, si elle répond à une demande sur place, est prise en charge par la France. Ainsi naissent de petites entreprises, souvent familiales, qui permettent à la famille en question de survivre grâce à une activité créatrice d'un peu de richesses. Toutefois, ce système a deux limites majeures: d'une part, la très grande majorité des sans-papiers n'y adhèrent pas et restent en France, préférant travailler dans de pénibles conditions et pour des salaires qu'ils considèrent comme plus attractifs; d'autre part, les clandestins venus d'Europe de l'est (et citoyens européens !), qui acceptent cet échange, récupèrent l'argent et, quelques mois plus tard, reviennent en France... mais, le gouvernement a récemment décidé de multiplier par deux ces aides au départ volontaire (de 150 à 300€ par adulte et de 50 à 100€ par enfant !).

Reste un problème, non évoqué dans ce documentaire, mais qui fait surface dans l'actualité: celui des conditions de travail et de logement de ces sans-papiers. D'une part, l'affaire de l'incendie d'un appartement de Neuilly où six pompiers avaient trouvé la mort rappelle à l'opinion que certains propiétaires profitent de la misère et de la clandestinité de ces sans-papiers pour les faire vivre dans des conditions que personne n'accepterait ! Et, d'autre part, la médiatisation des cas de neuf cuisiniers africains, salariés de "la Grande Armée", un resto chic situé à proximité de l'Arc de triomphe, rappelle les conditions de travail que les sans-papiers sont contraints d'accepter (peu de pauses et pas de vacances) et dont abusent certains employeurs. Ces neuf Ivoiriens, qui cotisent et paient leurs impôts, ont donc médiatisé leur combat, malgré le risque d'être expulsés ! A la lumière d'une telle affaire, comment ne pas soupçonner un gouvernement décidant de créer une immigration de travail de soutneir des pratiques qu'il faudrait combattre?

Pour ceux que ce dossier intéressent, n'hésitez pas à réagir en postant vos commentaires et, si vous êtes blogueur, à publier un article sur ce thème: la communauté "Pour un monde meilleur" (à laquelle vous pouvez adhérer en cliquant ICI) est faite pour cela !
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